lundi 5 juillet 2010

L'omelette de Pascal Clément et les œufs de Sainte Colombe


Dossier Autoroute A89
 * cet article est paru dans le Bulletin Municipal de Sainte Colombe sur Gand de Juin 2010

L'omelette de Pascal Clément et les œufs de Sainte Colombe*

Le jugement de Balbigny
Présentation du tracé de l'A89 dans la salle du cinéma de Balbigny, le 10 juin 2006. A la tribune, installée sur la scène, se trouvent le Préfet de la Loire, Stéphane Bouillon et Pascal Clément, alors Ministre de la Justice, député de la Loire, président du Conseil Général de la Loire, président de la Communauté de Communes de Balbigny et Maire de St Marcel de Félines. La salle est comble, une partie de l'assistance doit rester debout. Je suis installé dans un fauteuil au milieu de la salle.
Dès la fin de l'introduction, intervention de Joseph Delaye, Maire de Sainte Colombe sur Gand, qui dénonce un territoire  de Sainte Colombe sinistré par le tracé, et demande solennellement des compensations pour aider la commune à surmonter les difficultés. Pascal Clément lui répond vertement : « On ne fait pas d'omelette sans casser les œufs ».  Le ton expéditif du Ministre de la Justice et la posture martiale de la tribune sonnent comme un jugement sans appel ; à cet instant le sort de Sainte Colombe est jeté. Dans la rangée située devant moi on se tourne vers son voisin en s'exclamant « Qu'est-ce qu'ils nous emmerdent ces gens de Sainte Colombe ! », plus loin on préfère se taire mais c'est un silence réprobateur à l'égard de la commune, les plus prudents manifestent un air résigné, ça dure juste le temps nécessaire pour faire le tour de la salle, puis le Ministre enchaîne ; l'affaire de Sainte Colombe est entendue.

Le pouvoir et la parole
Quand on parle du haut d'une tribune affublé d'honneurs et du prestige du pouvoir représentatif, et que les mandats électifs ce sont ceux qui écoutent qui vous les ont accordés, alors ceux-ci n'ont pas d'autre choix que de vous croire, même quand vous leur dites qu'ils ont la coquille fragile comme celle d'un œuf. Malgré les imperfections bien connues de leur élu comme son cynisme enjoué et ses colères légendaires, ils ne savent que trop que le langage est l'arme la plus redoutable du pouvoir. Pascal Clément, l'homme politique j'entends, a manié ce jour-là le pouvoir et ses attributs avec la dextérité d'un virtuose qui joue à merveille de son instrument. La salle était réjouie du spectacle, captivée par le talent de l'orateur qui venait d'achever sa réplique en proférant : « Vous allez être riches comme Crésus ! ».
Et même si la salle avait accueilli sa dernière prophétie avec une certaine réserve, hésitant entre le comique et le dramatique, la phrase, parce que prononcée du haut des fonctions les plus nobles, avait fini par susciter le trouble dans les esprits. La foule se pressait désormais vers la sortie de la Salle, la mine réjouie et l'air un peu rêveur. Le Ministre a fini par serrer quelques poignées de mains avant de s'engouffrer dans la voiture officielle qui a quitté les lieux dans la liesse ensoleillée des grands jours.

Abandons et revirements
En novembre 2006, les ASF invitent les riverains à des réunions publiques d’information sur l'A89. La sous-préfète de Roanne participe à celle qui se tient à Sainte Colombe où l'équipe des ASF est venue à grands renforts. Le directeur des opérations annonce que pour des raisons techniques, l'Aire de Service ne sera pas installée sur la commune, contrairement à ce qui avait été prévu par les services de la préfecture (La lettre de l'A89, Préfecture du Rhône, Juin 1996). Des protestations s'élèvent dans la salle, mais les esprits sont anesthésiés par la brutalité et la multiplication de ces revirements : la remise en cause des choix opérés par les services de l'État, la condamnation publique de la commune par le député de la circonscription Pascal Clément, le tracé de l'A89 qui coupe le territoire de Sainte Colombe en deux, onze exploitations agricoles touchées... Les colombins quittent la réunion publique avec le sentiment d'avoir été abandonnés, d'abord par leur élu, ensuite par les services de l'État, pour être finalement livrés aux troupes des ASF.
L'omelette de Pascal Clément prend forme, l'élu restera désormais absent de ces réunions culinaires, ni lui ni personne pour le représenter et s'enquérir de la situation réelle. Et pourtant au même moment Joseph Delaye, Maire de la Commune, traduit un état de crise de manière très explicite et prémonitoire : « Je suis très inquiet. L’autoroute traverse notre commune sur 5 km qui comportent des zones ZNIEFF. Certains sont plus touchés que d’autres, il faut préserver les bâtis, les terrains. Ici, l’attachement à la terre est très important » (Bulletin ObjectifA89, ASF, décembre 2006).

Les œufs donnent de la voix
Ce qui n'était qu'une réplique d'opérette jouée sur la scène du cinéma de Balbigny, a fini par devenir une réalité. L'omelette A89 longue de 50 km se monte à 1700 Millions d'Euros, jaune comme tous les panneaux qui l'annoncent dans nos campagnes en ces temps de grands travaux. Le tracé de Sainte Colombe est à l'A89, ce que le nuage de Tchernobyl fut à la France ; un nuage radioactif qui traverserait l'Europe en évitant la France, comme le Ministre avait laissé entendre que l'omelette A89 n'allait compter que des œufs de Colombe ! Mais le bon sens populaire qui connaît mieux l'art culinaire que les nuages radioactifs, savait que tous les œufs, fragiles dans leur coquille, sont susceptibles de passer à la casserole. Et de rappeler qu'ils disposaient encore d'une voix, celle d'un bulletin de vote. A la surprise générale des experts en tout genre de cuisine électorale, Pascal Clément (UMP) est battu par Jean-Claude Tissot (Divers Gauche) lors de l'élection cantonale de Mars 2008.

Lendemains de défaite

Deux mois après sa défaite électorale, le 28 juin 2008, à l'occasion du lancement en fanfare des travaux de l'A89 à Violay, devant une foule composée de nombreux élus, Pascal Clément, manifestement affecté par sa débâcle, cherche la bonne tonalité. Tout en se félicitant lui-même de l'importance de l'ouvrage, il fait mine d'avoir compris les raisons de sa défaite et se lance dans une justification qui donne la mesure de sa morgue et de sa méconnaissance du territoire et de ses actes. Il dénonce une campagne électorale mensongère qui aurait fait croire que c'était lui, Pascal Clément à avoir dessiné le tracé. Et d'aller jusqu'à citer le nom, prénom et lieu d'origine du fonctionnaire qui avait été chargé de l'étude ! Au lieu d'exercer la fonction identitaire qui incombe au politique  et permet aux citoyens de se rassembler dans une maison commune, à l'écart des partis pris, sa parole d'élu (il est toujours député), fidèle au jugement de Balbigny continue à semer le trouble et à alimenter les ferments de la division.
L'année suivante, dans une interview accordée à un quotidien il continue à claironner la paternité de l'A89 « après trente années de combats ininterrompus ». A la question  du journaliste qui lui fait remarquer que malgré son importance, le projet ne lui a pas fait gagner l'élection cantonale, il réplique « Cette victoire, aujourd’hui pour tout un territoire, est à mettre en parallèle avec mon échec aux dernières cantonales. Car c'est bien à cause de l'A89 que j'ai été battu dans le canton de Néronde. Certains disaient à tort que c'était moi qui avais fait le tracé. Les agriculteurs notamment m'en voulaient.... » (Le Progrès-La Tribune, édition du 10 avril 2009).
Une fois de plus le talent du virtuose tente d'éclipser sa part de responsabilité, mais nulle part on ne trouvera trace des accusations dont il se plaint, au contraire, nous les avons clairement établies et documentées pour éviter les amalgames aussi inutiles que dangereux (on se reportera à l'article Les interventions de l'État et des ASF sur le tronçon de l'A89 à Ste Colombe, Bulletin Municipal de Sainte Colombe sur Gand, pages 14-15, 2009 ). Sa responsabilité politique est suffisante pour qu'il s'expose de lui-même aux gémonies d'un électorat qu'il a livré à l'impuissance face à la transformation irréversible du territoire.

La morale de la Colombe
Depuis deux ans que je suis à la Mairie, dans la grande masse de documentation accumulée depuis 1987 sur le projet de l'A89, je ne trouve pas la trace d'une lettre ou d'un simple mot, signé de Pascal Clément dans l'une des nombreuses fonctions assurées depuis cette époque. Pas un geste pour laisser entendre sa compréhension du territoire, pas un signe en direction  de Sainte Colombe, de l'équipe municipale, des habitants.
Je parle du ministre, député, président du Conseil Général de la Loire et président de la Communauté de Communes de Balbigny de l’époque, qui en cumulant tous ces mandats avait un accès privilégié à tous les niveaux de décision. C’est l’absence de position de sa part qui est inadmissible. Qui donc était en devoir d'interpeller tous les acteurs, depuis les services préfectoraux jusqu'au gouvernement lui-même ? Ne disposait-il pas de toutes les charges pour exercer son devoir ? Il aurait dû mettre son prestige et son pouvoir au service de Sainte Colombe, devant les caméras de la télévision et les rédactions de la presse écrite, commencer par installer sa permanence sur la commune, interpeller l'État, le gouvernement et défendre de tout son talent un aménagement intelligent qui, j'en ai la conviction, n'est pas incompatible avec la nécessité de l'A89. En faisant cela il aurait simplement rempli son devoir d'élu de tout un territoire. Personne ne lui aurait reproché d'avoir obtenu peu de choses, mais cela aurait suffi à assurer la nécessaire cohésion des habitants et des communes, et éviter de faire le lit à la méfiance, au doute, aux frustrations qui s'insinuent dans le corps d'un territoire comme un ver dans le fruit.
Mais à l'évidence, cela ne faisait pas partie des obligations morales de Pascal Clément. Son silence reste néanmoins celui du principal porteur du projet de l’A89, qui avait accès à tous les niveaux de décision depuis l’échelon local jusqu’aux plus hautes responsabilités de l'État. Ce silence résonne comme une véritable complicité à l'égard d'une omelette territoriale qui a commencé par griller son principal artisan politique pour mieux éclaircir les nouveaux horizons de la Loire. Que cette complicité résulte d’un acte volontaire ou d’une série de négligences ne change rien à la responsabilité politique de Pascal Clément qui est sans appel.

Andrea Iacovella

* cet article est paru dans le Bulletin Municipal de Sainte Colombe sur Gand de Juin 2010


 
Les mandats de Pascal Clément
  • Député UMP de la Loire (6e circonscription) depuis 1978 jusqu'à ce jour (fin du mandat en 2012);
  •  Deux fois ministre : 
    • Ministre délégué aux relations avec le Parlement de 1993 à 1995;
    •  Garde des Sceaux, ministre de la Justice du 02/06/2005 au 17/05/2007;
  • Conseiller général du canton de Néronde depuis 1982 jusqu'en 2008 :
    • président du Conseil Général de la Loire de 1994 à 2008;
    • vice-président du Conseil Général de la Loire de 1982 à 1994;
  • Président de la Communauté de Communes de Balbigny depuis sa création en 1993 jusqu'en 2008;
  • Maire de Saint-Marcel-de-Félines (Loire) de 1977 à 2001 puis membre du Conseil jusqu'en octobre 2007.

L'A89 à Sainte Colombe sur Gand en chiffres
  • 5,8 Km de tracé, sur les 16,2 Km du tracé ligérien; 
  • une ponction de 110 ha dont 70 de Surfaces Agricoles Utiles; 
  • la remise en cause de 20 ans de développement urbain; 11 exploitations agricoles sur 15 touchées; 
  • un Aménagement Foncier qui paralyse tout projet urbain d’initiative communale pendant plus d’une décennie, sur plus de 90% de la superficie du territoire; 
  • une ZNIEFF impactée (Zone Naturelle d'Intérêt Floristique et Faunistique) parmi les plus importantes du versant;
  • Une Aire de Service déplacée à Néronde, l'échangeur qui devait desservir le versant éclipsé dans les arcanes du feuilleton des ASF.

samedi 3 juillet 2010

Pascal Clément locataire de la Coby

Pascal Clément locataire de la Coby*

Depuis sa défaite à l'élection cantonale de Néronde de mars 2008, le député de notre circonscription, Pascal Clément, occupe toujours un bureau à l'Hôtel de la Communauté de Communes de Balbigny (Coby), au titre de sa permanence parlementaire. Lors du mandat précédent, l'Assemblée Communautaire l'avait autorisé, du fait de ses nombreux mandats électifs, locaux et nationaux : Maire de St Marcel de Félines, Président de la Coby, Conseiller Général du Canton de Néronde, Président du Conseil Général de la Loire et député de la 6ème circonscription. En retour de cette faveur, le parlementaire s'est toujours acquitté d'un loyer. L'installation de sa permanence parlementaire dans les locaux de la Coby était justifiée au nom d'une efficacité qui faisait consensus.
Mais depuis mars 2008 la situation n'est plus la même, Pascal Clément ne dispose plus d'aucun mandat local. La Communauté de Communes de Balbigny, placée sous l'autorité des 44 délégués représentant les 13 communes membres, se trouve confrontée à une profonde mutation de notre territoire, en relation avec l'A89 et l'échangeur situé à Balbigny. Situation inédite et complexe à gérer pour les élus de la Coby puisque ces leviers de développement suscitent des appétits voraces et comportent des risques d'inégalités territoriales.
Le député ne peut ignorer que l'indépendance des institutions de la République est le socle de la cohésion nationale et le garant de la concorde. Cela devrait suffire pour le décider à quitter les locaux de la Coby. Le rôle politique qu'il a joué dans le passé sur ce même territoire, en charge des nombreux mandats, rendent sa présence encore plus problématique, impossible à concilier avec un verdict des urnes sans appel.

Andrea Iacovella
* cet article est paru dans le Bulletin Municipal de Sainte Colombe sur Gand de Juin 2010

mardi 19 janvier 2010

Les interventions de l’Etat et des ASF sur le tronçon de l’A89 à Sainte-Colombe-sur-Gand

Argument
Le tracé de l'A89 dans le territoire de la Loire fait beaucoup parler de lui depuis de nombreuses années. Au cours des années 2007-2008, au moment de rendre public le tracé et d'engager les travaux projetés par les ASF, les tentatives de comprendre ce qui s'était passé se sont multipliées, surtout dans les communes rurales directement impactées par le tracé de l'A89. Rien d'anormal que de chercher à comprendre.
Au printemps 2008, lors de l'élection pour le renouvellement du Canton de Néronde, Pascal Clément (UMP), figure politique installée dans le pays depuis plus de trente ans, est battu par Jean-Claude Tissot (Divers gauche). Cette défaite s'accompagne par plusieurs autres renversements de situations, dans d'autres localités du même territoire, à l'occasion des élections municipales qui ont eu lieu le même jour.

Depuis sa défaite, Pascal Clément, n'a cessé de déclarer avoir été victime d'une campagne mensongère, qui lui aurait fait porter la responsabilité du tracé de l'A89 cherchant par là à éclipser sa responsabilité politique, lui qui depuis trente ans s'était vu confier tous les mandats électifs par les électeurs du territoire, depuis l'échelon local, parlementaire jusqu'aux plus hautes responsabilités de l'État en tant que ministre. 

Les propos de Pascal Clément (tenus dès le mois de juin 2008 à Violay lors du lancement des travaux), sont totalement infondés et tentent de dédouaner sa responsabilité politique à l'égard du territoire qui lui avait confié les mandats politiques pour le représenter. Nous aurons l'occasion de revenir dans un autre article (à paraître) sur la responsabilité qui incombe à l'élu. 
 Pour l'heure, j'ai estimé que la priorité était de clarifier la genèse technique de l'aménagement de l'A89. Dès mon installation à la Mairie de Sainte Colombe sur Gand, j'ai conduit une enquête pour recomposer, avec la rigueur de l'historien, documents originaux à l'appui, les étapes techniques d'élaboration du projet de l'A89. 
 
L'article qui suit, paru dans le Bulletin Municipal de Sainte-Colombe-sur-Gand de Février 2009, est un compte-rendu de cette enquête, il a pour objectif de porter à la connaissance de tous, les véritables mécanismes techniques qui ont conduit au tracé et à l'aménagement de l'A89 sur le versant ligérien.


  • > L'article
Premier chapitre : les services de l’Etat
L’avant-projet de l’A89, rédigé par les services de la préfecture en 1995-1997, prévoyait un dialogue avec les communes pour le choix du tracé et son aménagement. Il s’agissait de limiter les effets négatifs sur le territoire et la vie locale, tout en mettant l’ouvrage en position de favoriser son développement.
Ainsi, pour Sainte-Colombe-sur-Gand, trois variantes furent soumises à la discussion, une aire de service fut prévue sur la commune, "calée dans un boisement tout en offrant un panorama intéressant sur la région" (La Lettre d’A89, N° 7, juin 1996, Préfecture du Rhône), et "un diffuseur fortement souhaité sur la commune, situé à mi-distance entre Balbigny et Tarare, favorisant les activités artisanales, industrielles et touristiques des communes situées sur le versant entre Saint-Just-la Pendue et Violay" (Enquête publique 1997).
Au bout du compte, au moment où les travaux ont débuté en juin 2008, la situation était tout autre. Au fil des années, le tracé de l’A89 a fini par être imposé, sans détour et sans recours à la commune de Sainte-Colombe-sur-Gand par les services de l’Etat qui ont eu la charge de piloter le projet et de s’auto-accorder le permis de construire, et ce malgré l’opposition du Conseil Municipal qui s’était exprimé à l’unanimité contre le tracé, dès janvier 2000.

Au final, la réalité de l’A89 pour notre commune se passe de commentaire : 5,8 Km de tracé sur les 16,2 Km du tracé ligérien, une ponction de 110 ha dont 70 de Surfaces Agricoles Utiles, la remise en cause de 20 ans de développement urbain, 11 exploitations agricoles sur 15 touchées, un Aménagement Foncier qui paralyse tout projet d’initiative communale pendant plus d’une décennie, sur plus de 90% de la superficie du territoire, des ressources naturelles floristiques et faunistiques lourdement impactées (ZNIEFF  de type I de près de 400 ha, la plus importante de la région).

Deuxième chapitre : les ASF
Le deuxième chapitre est actuellement en cours d’écriture par les ASF (Société des Autoroutes du Sud de la France) chargées par l’Etat de procéder, en son nom, à l’acquisition des terrains, de construire l’ouvrage et d’en assurer l’exploitation.
Parmi les faits marquants notre commune, il faut retenir la suppression de l’aire de service et du diffuseur qui ont été victimes des révisions imposées par les ASF. Depuis leur entrée en fonction, les ASF exercent une mise à l’écart systématique de la commune dans les affaires nous touchant directement : fouilles archéologiques, avancement des travaux, modification des aménagements, études des dispositifs paysagers et un refus catégorique d’ouvrir un dialogue sur l’avenir de la commune en tenant compte de l’impact autoroutier. A cela s’ajoute la brutalité des procédures liées aux acquisitions et aux expropriations des terrains qui touchent propriétaires et exploitants. 

Dans quelle mesure l’attitude expéditive employée par les services de l’Etat pour boucler le projet a-t-elle contribué à inspirer aux ASF une méthode toute aussi martiale ? La position de neutralité dans laquelle se sont réfugiés les services de l’Etat depuis l’entrée en scène des ASF reste d’autant plus problématique pour une petite commune, qu’elle est prise dans une mécanique sans commune mesure avec ses moyens d’intervention. Alors que la situation imposée au territoire exige la pleine participation de tous pour réussir son nécessaire développement, les ASF cultivent une opacité systématique derrière une indifférence de façade qui conduisent à l’isolement de nos petites communes, qui manu militari, sont systématiquement placées devant le fait accompli.

A diverses reprises, le Conseil Municipal a tendu la main à la direction en charge des opérations des ASF, comme ce fut le cas, le 1er décembre dernier où elle fut reçue à Sainte-Colombe-sur-Gand. Mais à chaque fois les responsables des ASF ont opposé une fin de non-recevoir, n’hésitant pas à souffler le chaud et le froid, avec la superbe et l’insolence de tristes lieutenants d’armée en territoire occupé.

C’est là toute la complexité du mode de la « concession » attribuée par l’Etat aux ASF, censée représenter une forme de renouvellement de partenariat au service du bien public. Solution qui ne résiste pas à l’épreuve des faits et montre, que loin de se limiter à de la gestion, l’action des ASF ne cesse d’infléchir les choix et les orientations de l’aménagement de tout un territoire, bien au-delà de la bande d’asphalte et de béton sur laquelle flottera leur drapeau.


Être acteur de notre développement
Il n’est pas exagéré d’affirmer que l’Etat a failli dans sa mission d’Aménagement du territoire, n’hésitant pas à sacrifier le territoire d’une commune pour réaliser des économies d’argent (Compte-rendu du 21 février 2000, CETE, Ministère de l’équipement). Il n’est pas exagéré non plus d’ajouter que l’Etat a failli dans sa mission de médiation pour assurer le nécessaire rééquilibrage entre les petites communes rurales confrontées à la mécanique de l’administration centrale et aux pratiques révolues de la grosse machine des ASF.

Pour autant, la commune lance un appel au devoir de l’Etat à l’égard de ses collectivités. Sainte-Colombe-sur-Gand réaffirme sa volonté d’engager le développement de son territoire en prenant appui sur l’A89 et appelle à inverser le projet de satellisation et d’isolement des communes du versant, induits par les choix opérés par les ASF.

Instruits par l’importance de la contribution de notre commune à l’intérêt général, nous avons la conviction, que de fermer les yeux sur le caractère bâclé, improvisé et partial du projet de l’A89 et de sa réalisation est contraire à l’intérêt de tous.
Andrea Iacovella