mardi 19 janvier 2010

Les interventions de l’Etat et des ASF sur le tronçon de l’A89 à Sainte-Colombe-sur-Gand

Argument
Le tracé de l'A89 dans le territoire de la Loire fait beaucoup parler de lui depuis de nombreuses années. Au cours des années 2007-2008, au moment de rendre public le tracé et d'engager les travaux projetés par les ASF, les tentatives de comprendre ce qui s'était passé se sont multipliées, surtout dans les communes rurales directement impactées par le tracé de l'A89. Rien d'anormal que de chercher à comprendre.
Au printemps 2008, lors de l'élection pour le renouvellement du Canton de Néronde, Pascal Clément (UMP), figure politique installée dans le pays depuis plus de trente ans, est battu par Jean-Claude Tissot (Divers gauche). Cette défaite s'accompagne par plusieurs autres renversements de situations, dans d'autres localités du même territoire, à l'occasion des élections municipales qui ont eu lieu le même jour.

Depuis sa défaite, Pascal Clément, n'a cessé de déclarer avoir été victime d'une campagne mensongère, qui lui aurait fait porter la responsabilité du tracé de l'A89 cherchant par là à éclipser sa responsabilité politique, lui qui depuis trente ans s'était vu confier tous les mandats électifs par les électeurs du territoire, depuis l'échelon local, parlementaire jusqu'aux plus hautes responsabilités de l'État en tant que ministre. 

Les propos de Pascal Clément (tenus dès le mois de juin 2008 à Violay lors du lancement des travaux), sont totalement infondés et tentent de dédouaner sa responsabilité politique à l'égard du territoire qui lui avait confié les mandats politiques pour le représenter. Nous aurons l'occasion de revenir dans un autre article (à paraître) sur la responsabilité qui incombe à l'élu. 
 Pour l'heure, j'ai estimé que la priorité était de clarifier la genèse technique de l'aménagement de l'A89. Dès mon installation à la Mairie de Sainte Colombe sur Gand, j'ai conduit une enquête pour recomposer, avec la rigueur de l'historien, documents originaux à l'appui, les étapes techniques d'élaboration du projet de l'A89. 
 
L'article qui suit, paru dans le Bulletin Municipal de Sainte-Colombe-sur-Gand de Février 2009, est un compte-rendu de cette enquête, il a pour objectif de porter à la connaissance de tous, les véritables mécanismes techniques qui ont conduit au tracé et à l'aménagement de l'A89 sur le versant ligérien.


  • > L'article
Premier chapitre : les services de l’Etat
L’avant-projet de l’A89, rédigé par les services de la préfecture en 1995-1997, prévoyait un dialogue avec les communes pour le choix du tracé et son aménagement. Il s’agissait de limiter les effets négatifs sur le territoire et la vie locale, tout en mettant l’ouvrage en position de favoriser son développement.
Ainsi, pour Sainte-Colombe-sur-Gand, trois variantes furent soumises à la discussion, une aire de service fut prévue sur la commune, "calée dans un boisement tout en offrant un panorama intéressant sur la région" (La Lettre d’A89, N° 7, juin 1996, Préfecture du Rhône), et "un diffuseur fortement souhaité sur la commune, situé à mi-distance entre Balbigny et Tarare, favorisant les activités artisanales, industrielles et touristiques des communes situées sur le versant entre Saint-Just-la Pendue et Violay" (Enquête publique 1997).
Au bout du compte, au moment où les travaux ont débuté en juin 2008, la situation était tout autre. Au fil des années, le tracé de l’A89 a fini par être imposé, sans détour et sans recours à la commune de Sainte-Colombe-sur-Gand par les services de l’Etat qui ont eu la charge de piloter le projet et de s’auto-accorder le permis de construire, et ce malgré l’opposition du Conseil Municipal qui s’était exprimé à l’unanimité contre le tracé, dès janvier 2000.

Au final, la réalité de l’A89 pour notre commune se passe de commentaire : 5,8 Km de tracé sur les 16,2 Km du tracé ligérien, une ponction de 110 ha dont 70 de Surfaces Agricoles Utiles, la remise en cause de 20 ans de développement urbain, 11 exploitations agricoles sur 15 touchées, un Aménagement Foncier qui paralyse tout projet d’initiative communale pendant plus d’une décennie, sur plus de 90% de la superficie du territoire, des ressources naturelles floristiques et faunistiques lourdement impactées (ZNIEFF  de type I de près de 400 ha, la plus importante de la région).

Deuxième chapitre : les ASF
Le deuxième chapitre est actuellement en cours d’écriture par les ASF (Société des Autoroutes du Sud de la France) chargées par l’Etat de procéder, en son nom, à l’acquisition des terrains, de construire l’ouvrage et d’en assurer l’exploitation.
Parmi les faits marquants notre commune, il faut retenir la suppression de l’aire de service et du diffuseur qui ont été victimes des révisions imposées par les ASF. Depuis leur entrée en fonction, les ASF exercent une mise à l’écart systématique de la commune dans les affaires nous touchant directement : fouilles archéologiques, avancement des travaux, modification des aménagements, études des dispositifs paysagers et un refus catégorique d’ouvrir un dialogue sur l’avenir de la commune en tenant compte de l’impact autoroutier. A cela s’ajoute la brutalité des procédures liées aux acquisitions et aux expropriations des terrains qui touchent propriétaires et exploitants. 

Dans quelle mesure l’attitude expéditive employée par les services de l’Etat pour boucler le projet a-t-elle contribué à inspirer aux ASF une méthode toute aussi martiale ? La position de neutralité dans laquelle se sont réfugiés les services de l’Etat depuis l’entrée en scène des ASF reste d’autant plus problématique pour une petite commune, qu’elle est prise dans une mécanique sans commune mesure avec ses moyens d’intervention. Alors que la situation imposée au territoire exige la pleine participation de tous pour réussir son nécessaire développement, les ASF cultivent une opacité systématique derrière une indifférence de façade qui conduisent à l’isolement de nos petites communes, qui manu militari, sont systématiquement placées devant le fait accompli.

A diverses reprises, le Conseil Municipal a tendu la main à la direction en charge des opérations des ASF, comme ce fut le cas, le 1er décembre dernier où elle fut reçue à Sainte-Colombe-sur-Gand. Mais à chaque fois les responsables des ASF ont opposé une fin de non-recevoir, n’hésitant pas à souffler le chaud et le froid, avec la superbe et l’insolence de tristes lieutenants d’armée en territoire occupé.

C’est là toute la complexité du mode de la « concession » attribuée par l’Etat aux ASF, censée représenter une forme de renouvellement de partenariat au service du bien public. Solution qui ne résiste pas à l’épreuve des faits et montre, que loin de se limiter à de la gestion, l’action des ASF ne cesse d’infléchir les choix et les orientations de l’aménagement de tout un territoire, bien au-delà de la bande d’asphalte et de béton sur laquelle flottera leur drapeau.


Être acteur de notre développement
Il n’est pas exagéré d’affirmer que l’Etat a failli dans sa mission d’Aménagement du territoire, n’hésitant pas à sacrifier le territoire d’une commune pour réaliser des économies d’argent (Compte-rendu du 21 février 2000, CETE, Ministère de l’équipement). Il n’est pas exagéré non plus d’ajouter que l’Etat a failli dans sa mission de médiation pour assurer le nécessaire rééquilibrage entre les petites communes rurales confrontées à la mécanique de l’administration centrale et aux pratiques révolues de la grosse machine des ASF.

Pour autant, la commune lance un appel au devoir de l’Etat à l’égard de ses collectivités. Sainte-Colombe-sur-Gand réaffirme sa volonté d’engager le développement de son territoire en prenant appui sur l’A89 et appelle à inverser le projet de satellisation et d’isolement des communes du versant, induits par les choix opérés par les ASF.

Instruits par l’importance de la contribution de notre commune à l’intérêt général, nous avons la conviction, que de fermer les yeux sur le caractère bâclé, improvisé et partial du projet de l’A89 et de sa réalisation est contraire à l’intérêt de tous.
Andrea Iacovella

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